Des députés belges sur la "Liste noire" de l’Azerbaïdjan (OPINION)

Contribution externe
Des députés belges sur la "Liste noire" de l’Azerbaïdjan (OPINION)
©Blaise Dehon

Une opinion de parlementaires belges: André du Bus, Jean-Claude Defossé, Julie de Groote, Simone Susskind, Fatoumata Sidibé, Hervé Doyen, Paul Delva, Benoît Drèze, Emmanuel De Bock et Pierre Kompany.

Pour être allés au Nagorno-Karrabakh, une dizaine de nos parlementaires sont fichés comme indésirables en Azerbaïdjan. Lettre à leur ambassadeur.

Monsieur l’Ambassadeur d’Azerbaïdjan,

Votre pays doit receler des contrées magnifiques, où vivent, comme dans toutes les régions du monde, des parents et des enfants qui n’aspirent qu’à une chose : la paix.

Plusieurs parmi nous n’avons plus l’occasion de les rencontrer, de voir les sourires éclairer leurs visages sur les marchés, derrière des étals colorés de légumes, fruits de récoltes non encore intensives.

Parce que nous sommes désormais recensés sur votre "Blacklist", fichés comme indésirables dans votre pays.

Notre faute originelle ? En tant que parlementaires, belges, bruxellois, flamands et wallons, avoir serré les mains de mères et de pères sur le marché de Stepanaker, la capitale du Nagorno Karabagh, aujourd’hui devenu Artsakh. Cette République autoproclamée qui, depuis 26 ans, revendique son indépendance d’avec votre pays, l’Azerbaïdjan.

Pas comme en Belgique

Notre propos n’est pas de développer ici les enjeux de ce conflit gelé - avec toujours trop de morts chaque année aux frontières - qui résulte de la tension entre deux principes fondamentaux : le droit à l’autodétermination des peuples et celui de l’intégrité territoriale. Deux principes que nous déclinons de façon originale ici en Belgique, depuis bientôt deux cents ans, et sans victime.

Mais notre modèle n’est pas exportable, car chaque histoire recèle ses spécificités et nécessite l’élaboration de solutions originales et adaptées. Dans votre situation, un mandat a été confié au Groupe de Minsk pour formuler des pistes de solution.

Tensions exportées à l’étranger

Nous n’avons de leçon à donner à personne. Nous tenons seulement à rappeler ici que notre motivation première, celle qui est à la base de nos différentes visites au Nagorno Karabagh, prend sa source dans une volonté d’assurer le meilleur "Vivre ensemble" ici à Bruxelles et en Belgique. Un "Vivre ensemble" de plus en plus malmené, fragilisé par les replis identitaires des nombreuses communautés qui ont fait le choix de s’ancrer dans nos régions et de partager nos destinées. Car oui, les tensions qui se déclinent à des milliers de kilomètres d’ici, exacerbent, antennes paraboliques obligent, les sensibilités de celles et ceux qui sont devenus nos concitoyens.

Des mines tantôt azéries, tantôt arméniennes.

Si personne ne peut ni ne doit renier ses racines, l’avenir ne peut se construire que dans le respect de l’autre. Alors, nous voulons comprendre. Comprendre les sources de cette impossibilité de communication entre ceux qui se rangent derrière les Arméniens d’une part et ceux qui se rangent derrière les Azéris d’autre part, malmenant ainsi le fragile équilibre du Caucase. Car nos brèves missions informelles nous ont appris une chose certaine : toutes les mères que nous avons rencontrées veulent la paix.

Elles ne veulent plus voir leurs enfants partir au front, et elles souhaitent également la paix pour les familles qualifiées d’adverses. Tout comme la plupart des dirigeants que nous avons rencontrés.

Par ailleurs, la rencontre avec l’ONG Halo Trust, en charge du déminage d’anciennes zones de conflit, nous a permis de comprendre que les mines étaient tantôt azéries, tantôt arméniennes. Personne n’a le monopole de la vertu.

Mais nous avons découvert que le Nagorno Karabagh se nourrissait d’une démocratie ouverte, avec une opposition libre d’exprimer ses désaccords et une presse diversifiée. Nous avons assisté à un référendum récent, au cours duquel la régularité des procédures électorales a été soumise à notre examen.

Vous rencontrer ?

Aujourd’hui nous ne demandons qu’à rencontrer vos populations, échanger avec vos dirigeants, découvrir la beauté de votre pays et les richesses de vos institutions. Car nous sommes convaincus que si le raidissement des positions est annonciateur de fractures profondes, l’ouverture et l’échange restent les premiers vecteurs de paix.

Chez vous comme chez nous.

Titre, sous-titre et intertitres sont de la rédaction.

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